Rencontre de Fontaine (04/07) : Rapport de Marie-christine Burricand
6 mois après
notre congrès, plusieurs militants ont souhaité cette rencontre en Rhône-Alpes
pour faire ensemble le point de la situation politique et sociale, mesurer ce
qui a bougé ces 6 derniers mois, avoir un premier regard sur les élections
régionales de 2010, nous fixer peut-être des objectifs communs, faire le point
de nos bases organisée dans la région.
Ces derniers mois ont bien évidemment été
marqués par l’approfondissement de la crise sociale, politique et économique,
le refus du peuple d’en faire les frais, la volonté de la droite et du capital
de s’en servir pour aggraver l’exploitation, l’incapacité des partis politiques
– et singulièrement du PCF- de jouer son rôle pour que ce mouvement prenne
toute sa force et fasse reculer Sarkozy.
Pourtant en janvier, beaucoup pariait sur un
printemps chaud permettant des victoires. Il y avait longtemps qu’on n’avait
pas vu des manifestations aussi fortes et unitaires, rassemblant jeunes et
anciens, précaires et CDI, public et privé.
La situation était aussi marquée par la
multitude d’entreprises en lutte, les refus nombreux des salariés d’accepter
les plans de licenciements et délocalisations.
Car c’est d’un véritable sinistre pour
l’emploi qu’il s’agit, avec dans un premier temps la fin des contrats intérim,
puis les jours chômés qui s’allongent et les plans de licenciements.
Force est de constater que le 13 juin, le
mouvement avait perdu de sa force.
Pourquoi ? Vous donnerez votre avis dans
la discussion mais beaucoup de camarades soulignent l’aspect démobilisateur de
manifestations espacées de plus d’un mois, l’unité placée comme une fin en soi,
le fait que plutôt que de chercher à faire reculer Sarkozy ici et tout de suite
les directions syndicales et politiques ont renvoyé l’alternative aux échéances
électorales, particulièrement les européennes dont il n’y avait pourtant rien à
attendre pour le peuple. Dès les premières manifestations, le parti
« officiel » limitait sa participation aux manifestations à la
distribution de tracts en faveur du Front de gauche !
Parlons justement des élections européennes.
Pour dire d’abord l’essentiel, à savoir que le peuple ne s’y est pas retrouvé.
Il l’a montré par une abstention massive qui est d’abord celle des ouvriers,
des quartiers populaires, des jeunes, de ceux justement qui en 2005 avaient
permis la victoire du Non. Ceux là n’ont pas trouvé une offre politique leur
permettant d’exprimer leur rejet d’une construction européenne supranationale,
fer de lance du capital, dont l’objectif est de libérer toutes les activités
humaines pour le marché et de priver les peuples de leur pouvoir de décision.
Cette abstention a touché tous les pays
d’Europe, qui ont aussi connu des résultats de l’extrême-droite élevés.
Oui, le monde populaire n’a pas voulu jouer à
ce jeu de dupes.
C’est à cette lumière qu’il faut analyser les
résultats de cette élection, la soi-disant victoire de l’UMP, la dynamique
Cohn-Bendit, l’effondrement du PS, le maintien du FN dans le paysage politique,
la bonne tenue relative du Front de gauche essentiellement gagné par les
électeurs communistes.
C’est là où le PCF est le plus fort que le
Front de gauche fait ses meilleurs résultats.
Les résultats remis en pourcentage d’inscrits
invitent à la modestie. 59,35%d’abstentions, Extrême-gauche:2,37, Front de
Gauche : 2,35, PS : 6,40, Verts:6,32, Modem : 3,28, Ump :
10,83, Divers droite : 2,62
Nous ne partagions pas la démarche du Front
de gauche pour 2 raisons essentielles :
Nous considérions qu’il
s’agissait d’une nouvelle tentative de dilution du parti Le contenu de la
campagne restait très en deçà de la colère des peuples contre la construction
européenne qui s’était exprimée en 2005 par le NON.
Les
français ne croient pas à l’Europe sociale, même servie par la gauche, voire
par la gauche de la gauche.
Il faut avoir le courage de dire que pour
changer de politique en France, il faut s’affranchir du carcan de l’Union
européenne.
Selon les endroits, les expériences, les
rapports de force, nos attitudes par rapport à la campagne ont varié : du
refus assumé de mener campagne, sans pour autant tomber dans la
contre-campagne, à l’investissement dans la bataille pour que le parti pèse, en
passant par « le minimum syndical ».
Le résultat a permis l’élection de 2 députés
communistes, Jacky Hénin et Patrice le Hyaric, et personne ne va bouder. Il
permet aussi l’élection de Jean-Luc Mélenchon et Marie-Christine Vergiat,
ancienne membre du cabinet Aubry...Nous jugerons aux actes. Rappelons nous de
Geneviève Fraysse et Fodé Sylla avec « Bouge l’Europe ».
Force est de constater que si le Front de
gauche a pu sembler répondre à certaines attentes unitaires des électeurs du
Non, son résultat ne bouscule en rien la donne politique. Où est le dynamique
populaire ?
Au lendemain de l’élection européenne, ce qui
domine dans les consciences, c’est que « cela va continuer et cela va être
plus dur ». C’est ce que traduisent les manifestations rabougries du 13
juin, c’est ce que dit Nicolas Sarkozy dans son discours du 22 juin où il
annonce qu’il poursuit ses réformes versaillaises :
« - Nous ne reculerons pas sur la règle
du non remplacement d’un départ sur 2 à la retraite dans la fonction publique
- Nous
continuons pour repousser l’âge de la retraite et la durée de cotisations
- Il faut poursuivre dans la voie de
l’autonomie des universités La taxe professionnelle doit être supprimée »
Oui ces élections européennes permettent bien
à Sarkozy sur la base d’une victoire en trompe-l’œil et alors que les luttes
s’épuisent de reprendre l’offensive qu’il avait pourtant perdue depuis les élections
municipales et cantonales.
Quant au PCF, peut-on vraiment penser que la
tactique du Front de gauche, parce qu’elle permettrait de sortir de l’union
obligé avec le PS, peut constituer une issue ?
C’est faire preuve de beaucoup de naïveté et
d’abord sur Jean-Luc Mélenchon qui cherche d’abord à construire sa possible
candidature présidentielle en 2012.
Je considère au contraire que l’étau risque
de se resserrer sur le PCF. Il y a quelques jours, le Parti de gauche et le NPA
ont signé une déclaration commune annonçant qu’ils étaient d’accord des listes
autonomes du Front de gauche dans les 21 régions... Après s’être construit et
avoir pesé sur le NPA grâce au PCF aux européennes, Mélenchon pèse sur le parti
grâce au NPA, parti qui perd son initiative et son autonomie, se retrouve sommé
de choisir entre le PS et le Front de gauche...
L’existence d’un parti ne se mesure certes
pas qu’à l’aune de nos résultats électoraux. Mais penser qu’un parti pourrait
exister sans se frotter au thermomètre électoral, c’est aller à coup sur dans
le mur.
C’est aussi renoncer à porter la bataille
originale communiste, cette capacité historique propre au PCF et qui reste
possible malgré les difficultés de faire vivre dans le champ politique les
aspirations populaires, la volonté révolutionnaire, cette tentative difficile
et menacée, parfois renoncée de prendre sa place avec détermination dans les
institutions sans en être prisonnier pour toujours défendre l’intérêt
populaire.
Ce qui manque aujourd’hui, ce n’est pas une
énième alliance de sommet, serait-elle à la gauche de la gauche ! C’est
bien un parti révolutionnaire qui construit le front de luttes, l’unité populaire,
le rassemblement. Je crois, mais le débat est ouvert, qu’il faut des listes
communistes de large rassemblement aux régionales, une tête de liste
communiste, je crois que le Front de gauche est un leurre qui peut devenir un
piège mortel.
Comment allons-nous à la rentrée aborder
toutes ces questions, avec les communistes, avec les gens ?
Alors que la situation s’aggrave, quelles
initiatives politiques et idéologiques prenons-nous pour que l’expression de la
colère, la volonté d’arrêter Sarkozy l’emporte sur le découragement ? En
effet, si le réveil des luttes est possible, il n’a rien d’automatique.
Quelles initiatives sur
la réforme des collectivités locales ? Il faut faire mesurer ce qui se
prépare, l’effacement du socle républicain, la sortie du peuple des lieux de
décisions.
Quand le rapport Balladur
dit moins d’élus, il faut entendre moins de dépenses publiques, de nouveaux
secteurs libérés pour le marché.
Quand
le rapport Balladur annonce les métropoles et l’élection des conseillers
communautaires au suffrage universel, il faut entendre les communes réduites au
mieux aux affaires sociales et à l’état-civil.
Quand
il dit réforme de la fiscalité locale, il dit des élus ficelés et plus d’argent
pour le capital.
Et derrière la fusion des
conseils généraux et conseils régionaux, c’est la soumission des institutions
françaises à l’Union européenne supra nationale, la fin de l’unité républicaine
puisque les modes d’élection seront différents selon les territoires urbains ou
ruraux. Le tryptique républicain nation -département-commune cède la place au
tryptique cher à l’union européenne, europe-région- métropole, pour des élus
éloignés du peuple lui-même éloigné de décisions de plus en plus opaques.
Cette réforme c’est le nettoyage au karcher
de ceux qui dérangent les projets du capital, les traditions de résistance des
villes communistes, les expériences des conseils généraux de la région
parisienne, les communes comme lieux de résistance populaire, le refus des
élites technocratiques.
Enfin, comment abordons-nous la question des régionales avec les communistes, alors que la direction annonce un calendrier qui vise à empêcher le débat ? Est ce qu’on passe à l’offensive sur l’exigence de listes présentés par le PCF avec un contenu fort et des propositions de candidats ? Ne nous laissons pas refaire le coup des européennes avec Marie-Christine Vergiat !
Source : http://pcf.venissieux.org/spip.php?page=article&id_article=692